Projet de loi sur la maîtrise de l’immigration et le séjour des étrangers

La Coordination française du droit d’asile (CFDA) - qui regroupe une vingtaine d’associations nationales et de coordinations de provinces - s’inquiète de ce projet qui sera discuté au Parlement les 15 et 16 juin prochains.

Hormis les avancées, d’ailleurs très insuffisantes, sur la double peine, la Coordination ne peut que déplorer un projet dont l’adoption serait de nature à rendre encore plus pénible la vie des étrangers « extra-communautaires » et à dresser des obstacles encore plus grands aux demandeurs d’asile.

De ce second point de vue, on citera par exemple :

  • la suppression de l’attestation d’hébergement et son remplacement par un certificat d’hébergement, ce qui aura pour effet de rendre impossible aux rares demandeurs d’asile qui, en avaient la possibilité, d’obtenir un visa.
  • l’absence d’un recours suspensif en cas de refus d’entrée opposé aux frontières (spécialement en zone d’attente), refus d’entrée que risquent de faciliter dans l’avenir les notions d’asile intérieur et de pays d’origine sûre.
  • les dispositions relatives à l’asile temporaire qui ne devraient pas avoir leur place dans l’ordonnance du 2 novembre 1945 mais dans la loi du 21 juillet 1952 sur le droit d’asile, ce qui montre que l’on ne veut pas « protéger » ces personnes mais seulement les tolérer sur notre sol ; ces dispositions ne sont que la transposition « a minima » de la directive européenne alors que celle-ci laissait aux Etats la possibilité d’adopter des dispositions plus libérales : ainsi, le « droit au travail » ne sera autorisé que « le cas échéant ».
  • les dispositions relatives à la rétention administrative (jusqu’à 60 jours), probablement inconstitutionnelles, gravement attentatoires aux libertés fondamentales et probablement inefficaces pour faciliter la reconduite effective des étrangers ; les déboutés du droit d’asile seraient-ils punis d’avoir osé demander la protection de la France alors que la décision de l’OFPRA et, éventuellement celle de la Commission des recours des réfugiés, les aura rangés dans la catégorie des menteurs et des fraudeurs ?
  • les dispositions tendant à ce que les audiences du juge judiciaire sue le maintien en zone d’attente (article 35 quater de l’ordonnance) se tiennent dans une salle d’audience proche de la zone - solution critiquée par les avocats et les magistrats du TGI de Bobigny - ce qui aura pour effet de rendre plus difficile la présence du public et donc de nuire à une publicité effective des débats.

Comme la réforme du droit d’asile, ce texte sur l’immigration, dont seulement quelque points ont été relevés, est marqué par une suspicion généralisée de l’étranger. Le régime juridique de l’étranger est un régime de police qui doit se concilier avec les libertés fondamentales. Le curseur s’établit au détriment de celle-ci et au profit de celui-là. Avec de tels textes, la France fait fi de son histoire, marquée par une immigration importante, et tourne le dos aux idéaux (droits de l’Homme, droit d’asile) qu’elle ne cesse de proclamer.

12 juin 2003