Conditions d’accueil des demandeurs d’asile : une urgence qui dure

Après la fin du « plan froid », les conditions d’accueil des demandeurs d’asile sont de plus en plus critiques. L’incendie dramatique de l’hôtel Paris Opéra a mis en lumière le fait que plus de 8 000 personnes en difficulté étaient hébergées dans des hôtels en Ile de France, dont plus de 3 500 demandeurs d’asile. Privées d’hébergement, des familles demanderesses d’asile occupent l’université à Tours ; à Mulhouse, et ailleurs, d’autres dorment dans la rue. Des Irakiens, dont certains logés en région parisienne et en Normandie dans des centres spécialisés – CADA (Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile) et AUDA (Accueil d’Urgence des Demandeurs d’Asile) –, manifestent pour dénoncer l’attente insupportable (jusqu’à trois ans) entraînée par la décision de la Commission des Recours des Réfugiés de « geler » l’instruction de leurs dossiers. Dans le Calvados, un nouvel incendie a provoqué l’évacuation d’une soixantaine de réfugiés et demandeurs d’asile hébergés dans un hôtel prévu pour accueillir 35 personnes, montrant, s’il en était besoin, que l’hébergement des demandeurs d’asile dans un dispositif hôtelier au rabais est dangereux pour leur sécurité et ne peut plus être toléré.

L’accueil des demandeurs d’asile reste une urgence qui dure. La France est aujourd’hui en deçà des normes d’accueil – pourtant minimales – de la directive européenne dont la date limite de transposition intervenait le 6 février 2005. En 2004, seuls 15% des demandeurs d’asile ont eu accès au dispositif national d’accueil. Actuellement, les demandeurs d’asile non hébergés ne perçoivent une allocation de survie que pendant un an, alors que la durée de la procédure est en moyenne de vingt mois.

Loin de se conformer aux normes européennes, les dispositions réglementaires françaises organisent la précarité. Ainsi le décret du 14 août 2004 prévoit que, pour faire renouveler l’autorisation de séjour que lui garantit la loi, le demandeur d’asile doit justifier, après quatre mois de procédure, d’un lieu de résidence effective. Pour des milliers de demandeurs d’asile vivant dans la précarité, cette exigence nouvelle signifie concrètement qu’ils sont privés, d’une part, de titre de séjour, en dépit du fait que leur demande est toujours en cours d’examen, mais également des droits sociaux qui y sont attachés (allocation d’insertion, et en pratique accès aux CADA).

Pour sortir de cette crise persistante, la Coordination française pour le droit d’asile estime qu’il est urgent de mettre en place un véritable dispositif d’accueil avec :

  • La création de 10 000 places supplémentaires en CADA sur l’ensemble du territoire (y compris les DOM TOM). Cet hébergement doit prendre en compte les demandeurs d’asile dès leur arrivée en France.
  • Un accès à l’emploi ou des allocations permettant de vivre dignement pendant toute la durée de la procédure, conformément à l’article 13 de la directive européenne sur les conditions d’accueil.
  • Quel que soit par ailleurs le mode d’hébergement, un accompagnement socio-juridique pour tous, seul de nature à garantir l’égalité devant les procédures d’asile, assurant les traductions, les déplacements et l’assistance d’un conseil nécessaires.
  • Un accès réel à la formation professionnelle, linguistique et universitaire.
28 avril 2005

Sont signataires les associations suivantes, membres de la Coordination française pour le droit d’asile :
ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), Act-Up Paris, Amnesty International - section française, CAEIR (Comité d’aide exceptionnelle aux intellectuels réfugiés), CASP (Centre d’action sociale protestant), Cimade (Service oecuménique d’entraide), Comede (Comité médical pour les exilés), ELENA, FASTI (Fédération des associations de soutien aux travailleurs immigrés) Forum Réfugiés, GAS (Groupe accueil solidarité), GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés), LDH (Ligue des droits de l’homme), MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), Association Primo Levi (soins et soutien aux victimes de la torture et des violences politiques), Secours Catholique (Caritas France), SNPM (Service national de la pastorale des migrants).