Réforme de l’asile : commentaires et recommandations / 18 février 2003

Le gouvernement engage une profonde réforme de la législation sur l’asile. Un projet de loi va être prochainement soumis au parlement. Si le texte définitif n’est pas connu à ce jour, les grandes lignes concernant la modification de la loi du 25 juillet 1952 sont fixées. Depuis le début de l’année 2003, la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) a rencontré à plusieurs reprises des membres des cabinets du ministre de l’Intérieur et du Premier ministre et a été informée de certaines évolutions du texte gouvernemental.

La réforme envisagée fait suite aux déclarations du Premier ministre dans son discours de politique générale le 3 juillet 2002 et à celles du président de la République le 14 juillet. Le 25 septembre 2002, le ministre des Affaires étrangères en énonçait les grandes lignes [1] alors que la réforme du dispositif d’accueil était évoquée par le ministre des Affaires sociales le 26 novembre à l’Assemblée nationale.

Les commentaires qui suivent portent sur une version de l’avant-projet de loi dans sa rédaction du 10 janvier 2003, c’est-à-dire avant les derniers arbitrages interministériels. Ils sont inspirés par les informations recueillies lors d’échanges avec des représentants des ministères concernés et des constats faits par les associations membres de la CFDA depuis plusieurs mois. Il est peu probable qu’il y ait une remise en cause fondamentale de la philosophie générale des innovations qu’introduit ce texte. Les observations et mises en garde de la CFDA resteront sans doute d’actualité. Les commentaires ci-dessous rappellent également les principes défendus par la CFDA et devraient guider la réforme de la procédure d’asile.

De façon générale, la CFDA :

  • constate que l’ensemble du texte est marqué par une refonte en profondeur du dispositif d’asile, puisque sont touchées à la fois la composition des organes de détermination, la définition du réfugié ainsi que les procédures d’admission au séjour et de reconnaissance de la protection ;
  • note que la réforme privilégie la gestion des flux migratoires au détriment de la notion de « protection ». Cette orientation est marquée par les pouvoirs conférés aux préfets en matière de demande de réexamen de la protection subsidiaire mais également dans l’annonce par le ministre de l’Intérieur que des fonctionnaires de son ministère devraient être intégrés dans les effectifs de l’OFPRA [2], y compris à des postes décisionnels ;
  • regrette que l’avant projet de loi, qui s’inspire largement des propositions de directives actuellement en cours de discussion au sein de l’Union européenne, tende à s’aligner sur les normes minimales fixées par celles-ci lorsqu’il ne se situe pas en deçà (en particulier sur la protection subsidiaire ou sur la notion d’asile interne) ;
  • demande que les garanties de procédure annoncées dans la communication du ministre des Affaires étrangères figurent dans la loi sur l’asile (entretien systématique avec le demandeur, possibilité d’être assisté d’un conseil, etc…) et demande que l’Etat prenne en charge les frais de traduction et de transport ainsi que l’accès à l’aide juridictionnelle pour tous les demandeurs d’asile [3] ;
  • demande que toutes les précautions soient prises pour que la réduction des délais d’instruction, qui avait été l’annonce phare du président de la République le 14 juillet 2002, n’ait pas pour principal résultat l’accélération excessive des rejets, de nombreux demandeurs étant alors soumis à des mesures d’éloignement que le ministre de l’Intérieur veut rendre plus efficaces par un autre projet de loi.

OFPRA ET COMMISSION DES RECOURS DES REFUGIES

OFPRA et Conseil de l’OFPRA (articles 2 et 3 [4] )

Envisagées dans un premier temps, l’hypothèse d’une co-tutelle de l’OFPRA par les ministères de l’Intérieur et des Affaires étrangères ainsi que la sortie des représentants du HCR [5] et des associations du Conseil de l’Office semblent écartées. Le HCR verrait cependant son rôle modifié : alors que la loi actuelle prévoit que le Conseil de l’OFPRA est « soumis à sa surveillance », l’avant-projet ne retient que la notion de « coopération » entre les deux instances. Par ailleurs, d’après les informations fournies aux associations, une transformation des organes dirigeants de l’OFPRA serait mise en œuvre. Le Conseil d’administration verrait ses prérogatives renforcées, avec un président nommé sur proposition du ministre des Affaires étrangères, chargé de prendre les grandes orientations stratégiques. Le Conseil se prononcerait également sur les questions sociales et d’accueil. Le directeur général de l’OFPRA, nommé en Conseil des ministres, serait désormais placé « sous le contrôle du Conseil », il détiendrait l’autorité au quotidien avec une « obligation de résultat ».

  • La CFDA réitère sa recommandation que l’OFPRA soit doté d’une réelle indépendance afin d’assurer l’application pleine et entière des conventions et normes internationales de protection des réfugiés ; la recomposition du Conseil de l’OFPRA, telle qu’elle est envisagée, est une orientation négative, qui va à l’encontre de cette recommandation. En outre, la CFDA s’inquiète des conséquences de l’affaiblissement du rôle du HCR et demande que soient confirmés la présence et le rôle du HCR et des associations au sein du Conseil de l’Office.

Composition de la Commission des recours (article 5)

Un nouveau mode de nomination des membres de la Commission des recours des réfugiés est prévu, notamment pour les assesseurs. Ceux qui sont aujourd’hui directement nommés par le HCR seraient désormais nommés sur proposition du HCR, par le président de la Commission aux termes de l’avant-projet ou par le vice président du Conseil d’Etat. D’autre part, les ministres présents au Conseil d’administration de l’OFPRA nommeraient désormais leurs représentants directement.

L’équilibre et l’indépendance de la Commission des recours risquent d’être altérés par les nominations directes par les ministères et la modification de l’implantation du HCR au sein de la Commission. La CFDA craint qu’il ne s’agisse d’un abandon de la spécificité française et d’un désaveu de l’action du HCR.

  • La CFDA recommande à nouveau que la Commission des recours soit composée d’un juge administratif, d’un juge judiciaire et d’un représentant du HCR.

ACTEURS DE PERSECUTION ET DE PROTECTION
NOTION D’ASILE INTERNE

L’avant-projet de loi élargit la définition des acteurs de persécution par rapport à la jurisprudence française actuelle pour la reconnaissance de la qualité de réfugié (article 2) :

« Les persécutions prises en compte dans l’octroi de la qualité de réfugié et les atteintes graves pouvant donner lieu au bénéfice de la protection subsidiaire peuvent être le fait des autorités d’un Etat, de partis ou d’organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie substantielle du territoire de l’Etat ou d’acteurs non étatiques dans les cas où les autorités refusent ou sont incapables d’offrir une protection. »

La CFDA se réjouit que la loi explicite la notion d’acteurs de persécution d’une manière plus conforme à l’esprit de la convention de Genève et l’applique à la fois à la reconnaissance de la qualité de réfugié et à l’attribution de la protection subsidiaire.

L’avant-projet de loi ajoute une définition des acteurs de protection et de l’asile interne (article 2) :

« L’office peut rejeter la demande d’asile d’une personne qui aurait accès à une protection sur tout ou partie du territoire de son pays d’origine, qu’il est raisonnable de penser qu’elle peut y rester et qui n’aurait de ce fait aucune raison de craindre d’y être persécutée ou d’y être exposée à une atteinte grave.

Les autorités susceptibles d’offrir une protection peuvent être les autorités d’un Etat, des partis ou des organisations – y compris des organisations internationales – contrôlant l’Etat ou une partie substantielle du territoire de l’Etat »

La CFDA s’inquiète fortement de l’introduction des notions d’acteurs de protection et d’asile interne qui pourraient annihiler la possibilité concrète d’obtenir la protection de la convention de Genève ou la protection subsidiaire pour de nombreux demandeurs. Des exemples récents (les poches humanitaires en Bosnie, la zone humanitaire au Rwanda) ont en effet montré que, même sous la protection d’une force internationale, la possibilité d’une option d’asile interne n’est pas une forme de protection suffisante et durable.

En outre, la rédaction connue est d’une part très floue, d’autre part en deçà de la norme minimale européenne en cours de discussion [6] : en effet, le texte parle d’un « accès à une protection sur tout ou partie du territoire de son pays d’origine » sans que ne soit explicitée la possibilité raisonnable de s’installer durablement et d’y jouir de l’ensemble des droits attachés à une protection (droits fondamentaux mais également économiques et sociaux). Ces éléments sont pourtant la principale condition fixée par les recommandations du HCR [7] .

Il existe un réel danger que la possibilité théorique d’un asile interne par un acteur de protection différent de l’Etat soit utilisée pour rejeter les demandes d’asile de personnes qui ont dû fuir non seulement des persécutions et des menaces graves dans une partie du territoire mais également l’indigence et l’absence de droits dans une autre partie du territoire.

  • La CFDA demande que les notions d’acteurs de protection et d’asile interne ne soient pas introduites dans la loi sur l’asile.

DEFINITION ET MOTIFS DE REFUS DE LA PROTECTION SUBSIDIAIRE

L’avant-projet de loi prévoit de supprimer l’asile territorial et de le remplacer par la notion de protection subsidiaire définie ainsi (article 2) :

« Sous réserve des dispositions de l’alinéa 4 du présent article, il accorde le bénéfice de la protection subsidiaire à toute personne qui ne remplit pas les conditions d’octroi du statut de réfugié … et qui établit qu’elle est exposée dans son pays à l’une des atteintes graves suivantes :

  • la peine de mort ;
  • la torture, ou une peine ou un traitement inhumain ou dégradant ;
  • une menace grave et personnelle contre sa vie ou sa personne en raison d’une violence indiscriminée résultant d’une situation de conflit armé interne ou international »

Cette définition s’inspire de celle actuellement en débat au sein de l’Union européenne. Tout d’abord, la CFDA s’interroge sur l’interprétation qui pourra être faite de la compatibilité entre « violence indiscriminée » et « menace grave et personnelle », qui plus est, résultant d’une situation de conflit armé interne ou international. L’incertitude qui entoure la notion de conflit armé interne oblige à la prudence sur le pouvoir d’appréciation ainsi laissé aux autorités chargées d’examiner la demande. D’autre part, l’avant-projet de loi fait disparaître la notion de « menace grave contre la liberté » d’une personne, qui figure actuellement comme cause d’éligibilité à l’asile territorial, restreignant le champ d’application.

La CFDA estime que la définition de la protection subsidiaire, notamment si elle est couplée aux notions d’asile interne et d’auteurs de protection, va créer de nouvelles situations de personnes ni éligibles, ni reconductibles, en particulier si elles viennent de pays où existe un conflit armé interne ou international.

  • La CFDA demande que des garanties soient explicites pour que « le bénéfice de la protection subsidiaire » soit effectivement accordé à toute personne répondant aux critères et « qui ne remplit pas les conditions d’octroi du statut de réfugié » et qu’une application restrictive de la Convention de Genève ne substitue pas la protection subsidiaire à la protection du statut de réfugié.
  • La CFDA demande que la notion de menace contre la liberté d’une personne soit maintenue comme motif susceptible d’être pris en considération pour l’application de la nouvelle protection subsidiaire ;
  • et qu’en outre, la protection subsidiaire permette de protéger ceux qu’il est manifestement impossible de renvoyer en raison de situations d’insécurité générale ou de manque de liaison de transport et ceux dont la mesure d’éloignement est annulée en ce qui concerne le pays de renvoi sur la base de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La cessation et l’exclusion de la protection subsidiaire

L’avant projet de loi prévoit que la protection subsidiaire peut être refusée aux personnes :

  • « dont on aura des raisons sérieuses de penser qu’elles ont commis un crime »
  • « dont la présence sur le territoire est susceptible de constituer une menace à la sécurité ou à l’ordre publics. »

Il précise :

« Le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé pour une période d’un an renouvelable. L’Office peut retirer à tout moment le bénéfice … pour les motifs prévus au premier alinéa du présent point. Il peut refuser à chaque échéance de renouveler … lorsque les circonstances ayant justifié son octroi ont cessé d’exister ou ont connu un changement suffisamment profond pour que celle-ci ne soit plus requise.

Le représentant de l’Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut saisir l’Office d’une demande de réexamen »

La CFDA regrette la nature particulièrement précaire du nouveau statut de protection subsidiaire.

La CFDA s’inquiète de voir que le « crime », qui ne fait l’objet d’aucune précision quant à sa nature et sa gravité apparaît comme motif d’exclusion de la protection. Il en est de même pour la simple « menace pour la sécurité ou l’ordre publics », alors que ces notions, dont les éléments constitutifs ne peuvent être répertoriés, sont en droit français des plus mouvantes.

  • La CFDA demande que les motifs d’exclusion de la protection subsidiaire, s’ils devaient exister, ne soient pas plus larges que ceux de la Convention de Genève.
  • La CFDA demande que la possibilité ne soit pas donnée au préfet de saisir l’OFPRA d’une demande de réexamen de la situation d’un bénéficiaire de la protection subsidiaire avant son terme, surtout que l’avant projet ne précise pas les motifs qui fondent cette intervention.

RECOURS EN REVISION

L’avant projet de loi crée la notion de recours en révision (article 5) : le directeur de l’OFPRA pourrait faire un tel recours lorsqu’il estime que la décision prise par la Commission des recours a résulté d’une fraude et la Commission statuerait sur ces recours.

  • La CFDA demande que le recours en révision contre des décisions de la Commission des recours ne soit pas introduit dans le projet de loi car cette mesure fait peser une menace sur la stabilité du statut des réfugiés.

En revanche, la Commission des recours n’aurait plus à se prononcer sur les requêtes adressées par des réfugiés statutaires exposés à une menace d’éloignement. Cette suppression semble contraire à l’article 32-2 de la Convention de Genève qui prévoit que, en cas d’expulsion, « le réfugié devra, sauf si des raisons impérieuses s’y opposent, être admis à fournir des preuves tendant à le disculper, à présenter un recours et à se faire représenter devant une autorité compétente ».

  • La CFDA demande que soit conservée la procédure d’avis de la Commission des recours contre les mesures d’expulsion prises à l’encontre des réfugiés qui représente une garantie du respect des articles 31, 32 et 33 de la Convention de Genève.

EXCLUSION, PROCEDURE ACCELEREE ET PAYS D’ORIGINE SURS

La procédure accélérée (article 10)

L’avant projet de loi ajouterait aux exceptions à l’admission au séjour prévues à l’article 10, les motifs suivants :

  • « 2° - le demandeur a la nationalité d’un pays considéré comme sûr au sens des engagements internationaux de la France
  • 4° - notamment lorsque la personne est maintenue dans des locaux mentionnés à l’article 35 bis de l’ordonnance du 2 novembre 1945 ».

Le délai d’examen des demandes ayant fait l’objet d’un refus de séjour serait fixé à 15 jours, délai réduit à 72 heures lorsque le demandeur est placé en rétention.

Pays sûrs

La CFDA estime que l’introduction de la notion de pays d’origine sûr dans la législation nationale est une grave entorse au principe de non discrimination énoncé par l’article 3 de la convention de Genève [8] , les demandes des ressortissants de ces pays ne bénéficiant alors que d’un examen rapide et sans recours suspensif. La CFDA s’interroge sur les critères qui seront adoptés pour déterminer ces pays dits d’origine sûrs.

  • La CFDA demande que la notion de pays d’origine sûr ne soit pas introduite dans la loi sur l’asile.

Délai d’instruction et recours

L’instruction des demandes accélérées serait limitée à 15 jours, voire à 72 heures pour les personnes maintenues en rétention administrative, ce qui ne permet pas un examen approfondi de la demande, surtout sans recours suspensif.

  • La CFDA demande que des recours en urgence et suspensifs soient introduits dans la législation afin que l’étranger puisse contester le refus d’admission au séjour au titre de l’asile et l’éventuelle décision de rejet de sa demande par l’OFPRA.

PROCEDURE ET ADMISSION AU SEJOUR DES DEMANDEURS D’ASILE

L’avant projet de loi prévoit de retarder la délivrance de documents provisoires de séjour après le reçu du dépôt de la demande d’asile à l’OFPRA (article 11). Auparavant, il serait remis « un document » pour déposer une demande dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat. C’est également un décret qui fixerait le délai pendant lequel le demandeur doit déposer sa demande ainsi que la durée de validité des divers documents de séjour.

La CFDA, attachée au principe de l’admission au séjour des demandeurs d’asile, fait part de son inquiétude vis à vis de cette admission retardée, qui ne saurait être justifiée par l’hypothèse d’un usage frauduleux. Elle considère que les documents de séjour doivent être de durée suffisante pour assurer l’accès des demandeurs d’asile aux dispositifs sociaux de droit commun (CMU) ou spécifiques (hébergement, allocation pour vivre dignement…). Depuis de longs mois, la CFDA a alerté les pouvoirs publics sur les dysfonctionnements graves de services préfectoraux, conduisant à des délais d’attente de plusieurs mois et à des pratiques illégales.

  • La CFDA demande que le délai qui sera fixé par décret en Conseil d’Etat soit le plus court possible et, à tout le moins, inférieur à trois jours, délai prévu par l’article 6 de la directive européenne sur les normes minimales d’accueil.

AU DELA DE L’AVANT-PROJET DE LOI SUR L’ASILE

L’asile à la frontière

Dans le projet de loi sur l’asile, aucune modification n’est annoncée pour la procédure d’asile à la frontière. Pourtant, l’examen à la frontière par le ministère de l’Intérieur est de plus en plus restrictif et devient une véritable pré-détermination de la qualité de réfugié, bien que ce ministère n’en ait ni la mission ni la compétence. Le taux d’admission sur le territoire ne cesse de diminuer au point d’être inférieur au taux global d’admission ultérieure au statut de réfugié. Cela est d’autant plus grave que ces refus ne sont pas susceptibles de recours suspensifs et que les personnes peuvent être refoulées immédiatement.

  • La CFDA demande que la procédure d’asile à la frontière soit réformée et que la loi instaure un recours suspensif pour les décisions de refus d’entrée, suivant le modèle de l’article 22 bis de l’ordonnance du 2 novembre 1945. La CFDA demande que les droits inscrits à l’article 35 quater soient effectivement assurés (conditions d’hébergement, droit à un médecin et aux visites de son choix).
  • La CFDA demande la possibilité d’un accès permanent aux zones d’attente pour les associations habilitées afin d’assurer l’exercice effectif des droits des personnes maintenues.

Les risques des procédures accélérées

La CFDA est inquiète des applications abusives des procédures accélérées – rendues plus nombreuses par l’avant-projet de loi – et du nombre croissant de demandeurs d’asile visés par ces mesures. Il en va en particulier ainsi des cas « Dublin », concernés par cette procédure destinée à organiser la remise d’un demandeur d’asile à l’Etat membre de l’Union européenne considéré comme responsable du traitement de sa demande. Ces cas pour lesquels l’OFPRA n’est pas saisi risquent de se multiplier du fait de la mise en œuvre du règlement Eurodac sans compter les conséquences de l’élargissement de l’Union.

  • La CFDA demande que les personnes puissent faire examiner leur demande d’asile dans l’Etat membre de leur choix. A tout le moins, les préfectures doivent préserver les liens familiaux et culturels des demandeurs.

La domiciliation

Une adresse est une exigence fixée par la réglementation pour l’exercice effectif du droit d’asile. La CFDA estime que les dispositions réglementaires actuelles concernant la domiciliation du demandeur ne doivent pas être modifiées : un domicile réel ne doit pas être exigé et les associations domiciliant les demandeurs d’asile ne doivent pas être assujetties à un quelconque « agrément » par les services des étrangers.

  • La CFDA demande que, pour assurer l’équité entre les demandeurs et faciliter leurs démarches, les services de l’Etat et des collectivités territoriales contribuent à assurer la domiciliation, en particulier en obligeant les centres communaux d’action sociale à appliquer la loi contre l’exclusion. Les associations pourront dès lors s’y insérer à titre complémentaire.

Les mesures transitoires

Le gouvernement a annoncé que la réforme des procédures d’asile serait mise en œuvre début 2004 et il a annoncé diverses mesures pendant la période dite « d’assainissement ».

A propos de la période dite « d’assainissement », la CFDA pose les questions suivantes :

  • L’introduction d’un guichet « unique » permettra-t-elle au demandeur de choisir une forme de protection particulière ? Une personne déboutée de l’une des formes d’asile actuellement connues pourra-t-elle introduire une demande pour une autre forme d’asile ? Qu’en sera-t-il des recours contre des rejets pris par l’OFPRA ou le ministère de l’Intérieur avant le 1er janvier 2004 : la Commission des recours devra-t-elle instruire le dossier sur les deux formes d’asile alors que la décision en première instance est basée sur une seule ?
  • La référence au système d’accueil belge évoquée par le ministère des Affaires sociales laisse planer la menace d’un abandon de la spécificité française concernant le choix de l’hébergement et peut-être des allocations de survie, de l’accès au travail à la formation linguistique et professionnelle. En l’état actuel, aucune information sur les mesures législatives ou réglementaires sur les conditions d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile ne nous est connue autre que les mesures budgétaires d’ouverture de places CADA (1700 places dans le budget 2003).

La CFDA rappelle son attachement à un système mixte d’hébergement collectif et individuel ainsi que le versement d’allocations pour permettre à tous les demandeurs de vivre dignement pendant la durée de la procédure.

Enfin, la CFDA demande que tout soit fait pour que les milliers de demandes en instance (35.000 pour ne citer que l’OFPRA) soient examinées avec toutes les garanties nécessaires pendant la période précédent la mise en œuvre de la loi et ne soient pas rejetées dans la précipitation sans garanties minimales, notamment un entretien individuel.

18 février 2003

La Coordination française pour le droit d’asile rassemble les organisations suivantes :

ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), Amnesty International - section française, APSR (Association d’accueil aux médecins et personnels de santé réfugiés en France), AVRE (Association pour les victimes de la répression en exil), CAEIR (Comité d’aide exceptionnelle aux intellectuels réfugiés), CASP (Centre d’action sociale protestant), Cimade (Service oecuménique d’entraide), Comede (Comité médical pour les exilés), Croix Rouge Française, Forum Réfugiés, FTDA (France Terre d’Asile), GAS (Groupe accueil solidarité), GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés), LDH (Ligue des droits de l’homme), MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), Association Primo Levi, Secours Catholique (Caritas France), SNPM (Service National de la Pastorale des Migrants), SSAE (Service social d’aide aux émigrants).

La délégation française du Haut Commissariat pour les Réfugiés est associée aux travaux de la CFDA.

Notes

[1Principales mesures annoncées et applicables début 2004 : réduction des délais d’instruction à deux mois, « guichet unique » à l’OFPRA, abandon du critère de l’origine étatique des persécutions et création d’une « protection subsidiaire », déconcentration de l’OFPRA, audition systématique des demandeurs, présence d’un avocat.

[2Office français de protection des réfugiés et apatrides.

[3En 2001, seuls 10% des demandeurs d’asile ont pu en bénéficier.

[4Loi relative au droit d’asile du 25 juillet 1952.

[5Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

[6Proposition de directive concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants de pays tiers et les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou de personne qui, pour d’autres raisons, a besoin d’une protection internationale et relatives au contenu de ces statuts.

[7Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié, 1979, § 91.

[8Les Etats contractants appliqueront les dispositions de cette Convention aux réfugiés sans discrimination quant à la race, la religion ou le pays d’origine (article 3, Convention du 28 juillet 1951).